Friday, November 9, 2007

les analyses de certains chercheurs sur la visite de Kabila à Washington


RDC
La véritable attitude des USA vis-à-vis de la situation au Nord-Kivu
8 novembre 2007

Lors de la récente visite du président congolais à Washington, les médias de Kinshasa ont presque unanimement rapporté que le voyage de Joseph Kabila avait été couronné de succès, marqué, selon eux, par un appui sans réserve que le président George Bush aurait accordé à son homologue congolais. À en juger par le dernier communiqué du Département d'État, la vérité semble toute autre.

Nous citons : « Dans un communiqué diffusé le 1er novembre 2007, le département d'État des États-Unis affirme appuyer les mesures proposées par les autorités de la République démocratique du Congo en vue d'éliminer la menace de violence et d'insécurité que font peser les vestiges des anciennes Forces armées rwandaises (ex-FAR) et la milice Interahamwe dans la partie orientale du pays, et se félicite de la réponse du gouvernement rwandais à cette proposition. » On peut lire la suite de ce communiqué sur le site web usinfo.state.gov.

Commençons par souligner qu'on ne trouve à nul part dans ce communiqué une référence quelconque au général Laurent Nkunda. Les seuls forces négatives auxquelles on fait ici référence sont les ex-FAR et les Interahamwe. Comme il est très improbable que le président Kabila n'ait pas mentionné le "problème Nkunda", il nous faut logiquement conclure que Washington n'abordera pas publiquement ce "problème", avant que les groupes armés rwandais présents dans l'est du pays ne soient véritablement neutralisés.

En attendant, les FARDC envoyées en renfort pour neutraliser Nkunda et les dissidents Banyamulenge des Hauts Plateaux sont embourbées, à l'image des troupes américaines en Irak, et n'ont fait qu'enregistrer des pertes depuis le début du lancement de cette aventure militaire qui ne va nulle part. À titre d'exemple, en date de la fin octobre 2007, pour les seuls Hauts Plateaux de l'Itombwe, sur un contingent qui comptait un minimum de 4.000 militaires, les FARDC avaient déjà laissé sur le terrain plus de 400 morts, sans compter les blessés. On se souviendra que la deuxième région militaire avait promis une opération éclair de deux jours pour en finir avec les militaires dissidents Banyamulenge, estimés à l'époque à 150 hommes à peine. Mais voilà, après presque une année d'opérations militaires on se retrouve avec un scénario irakien sur les bras.

Face à cette situation, Joseph Kabila et son entourage on bien compris que la carte du général Patrick Masunzu n'était plus gagnante. C'est ainsi que le président Kabila a décider, il y a quelques semaines déjà, de dépêcher sur les lieux un négociateur en la personne d'un autre Munyamulenge, le général Mustapha, qui est l'actuel commandant de la grande base militaire de Kitona. Selon les informations qui nous sont parvenues, le général Mustapha a déjà rencontré à plusieurs reprises les officiers commandants les dissidents dans la localité de Mikenke. Selon les mêmes sources, les dissidents auraient affirmé qu'ils ne faisaient pas la guerre contre le gouvernement de la RDC, mais plutôt contre un seul individu, en la personne du général Patrick Masunzu qui est responsable du massacre et de l'enterrement dans une fosse commune, en décembre 2006, d'un groupe de leurs collègues officiers Banyamulenge. Les dissidents demandent donc le renvoi de Masunzu du poste de commandant en second de la 10ième région militaire, ainsi que son jugement en cour martiale pour répondre du meurtre de ces officiers congolais. Là encore, en dépit du fait que Masunzu ait été incapable de livrer la marchandise (c.-à-d. les militaires dissidents Banyamulenge), il est très peu probable que Joseph Kabila puisse le sacrifier sur l'hotel de la réconciliation.

Du côté du Nord-Kivu, les pertes des FARDC sont également élevées. Mais le grand sujet d'actualité demeure, pour le moment, le ballet diplomatique lancé par l'Oncle Sam et qui fut rapidement imité par l'ONU. La France elle, semble avoir manqué le coup de départ, puisque Bernard Kouchner qui devait débarquer à Kinshasa, le vendredi 9 novembre, a reporté son déplacement à une date ultérieure, non précisée. De toute manière, on voit très mal comment ce ballet diplomatique apportera une solution magique à la véritable question de fond, à savoir le désarmement des ex-FAR et des Interahamwe dans l'est du Congo. Premièrement rien ne prouve, en effet, que ces derniers auraient perdu le soutien logistique et politique national international dont ils bénéficient depuis 1994. Deuxièmement, ils contrôlent depuis un certain temps des zones plus vastes que jamais, mais surtout très difficiles d'accès pour des opérations militaires offensives de grande envergure qui seraient entreprises contre eux.

Au beau milieu de ce grand ballet diplomatique, on ne peut s'empêcher de constater la nomination, par le secrétaire général de l'ONU, d'un envoyé spécial au Nord-Kivu, alors que l'on compte déjà au Congo, un représentant spécial qui est à la tête de la MONUC, plus grosse mission de paix dans le monde des Nations Unies. De plus, cet envoyé spécial n'est autre que M. Haile Menkarios qui vient juste d'être remplacé dans son poste précédent de représentant spécial-adjoint du secrétaire général de l'ONU en RDC. On peut donc se demander pourquoi on l'a remplacé, si c'est pour le ramener aussitôt dans le paysage par une fenêtre dérobée. Quoi qu'il en soit, on voit bien que le dossier du Nord-Kivu ne sera plus, dorénavant, géré par la seule hiérarchie militaire et civile de la MONUC. Probablement que, comme c'est déjà le cas à la Maison Blanche et au département d'État, le personnel de la Tour de verre à New York aurait peut-être senti quelque chose de "croche" dans la gestion du dossier Nkunda par le haut commandement militaire (franco-sénégalais) de la MONUC sur le terrain.

Pendant ce temps à Kinshasa, c'est la rumeur du remaniement ministériel imminent qui occupe beaucoup de place dans l'esprit des gens du portefeuille et de la presse. On évoque même une "ouverture à la Sarkozi" pour la prochaine équipe gouvernementale. Sûrement que les vagabonds politiques, qui ne manquent pas, ont déjà fait des belles manières aux différents chefs des partis qui composent l'Alliance de la Majorité Présidentielle (AMP), en commençant, par le grand chef du PPRD, Joseph Kabila. Ce dernier, qui en plus de tous les pouvoirs qu'il concentre déjà entre ses mains, voudrait maintenant se faire nommer à la tête du Conseil supérieur de la magistrature. Pour y arriver, de façon légale, Kabila a demandé aux députés de l'AMP (qui sont majoritaires) de faire adopter un amendement constitutionnel approprié. Bref, l'Occident finira peut-être par comprendre (un peu tard, tout de même) qu'il a balancé presque un milliard de dollar pour fabriquer démocratiquement un dictateur. C'est ce qu'on appelle une démocrature, comme il en existe d'autres en Afrique : Togo, Gabon, Burkina Fasso, Tchad, Cameroun, Congo-Brazza, etc. Tous des pays "amis" de la France et surtout de la Françafrique.

La rédaction

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